Le protocole ETAL permet d’évaluer rapidement (environ 30 min. de passation) la nature d’un trouble acquis en lecture à voix haute chez des personnes de langue maternelle française présentant une aphasie – AVC, traumatisme crânien ou trouble dégénératif. Ce protocole permet d’enregistrer automatiquement les réponses orales du patient afin de mieux cibler un dysfonctionnement spécifique, grâce à une analyse des erreurs en termes de précision et de dynamique du traitement des mots écrits.
L’aphasie, trouble acquis du langage survenant à la suite d’une affection du système cérébral, altère de façon variable les processus de production et/ou de compréhension du langage oral et dans une proportion moindre mais non négligeable, ceux de la lecture (Knollman-Porter et al., 2015; Lecoffre et al., 2017; Lemay, 1992).
Du point de vue étiologique, le trouble linguistique peut survenir à la suite d’un problème vasculaire, d’un traumatisme crânien (Mazaux et al., 1997) ou d’une maladie dégénérative (Mesulam, 2001), mais la cause la plus fréquente de l’aphasie reste l’Accident Vasculaire Cérébral (AVC) (Lecoffre et al., 2017; Sabadell et al., 2022).
Des études épidémiologiques (voir Peretti et al., 2012 ; Madden et al., 2018) montrent que les difficultés à lire consécutives à un AVC apparaissent fréquemment. Pourtant, la lecture n’est généralement pas évaluée en phase aigüe (Flamand-Roze et al., 2011; Rohde et al., 2018) et l’est peu chez les patients chroniques. Cette situation fait dire à certains chercheurs que le trouble de la lecture est durable précisément parce que les premières prises en charge focussent sur la remédiation de la communication fonctionnelle, c’est à dire orale et ne prennent pas en compte la lecture (Knollman-Porter et al., 2015).
Or, aujourd’hui, l’écrit est continuellement présent dans nos activités quotidiennes, qu’elles soient de première nécessité comme faire les courses, gérer la banque, suivre des instructions écrites pour réaliser une tâche donnée, se déplacer en ville ou qu’elles soient moins immédiatement cruciales comme lire un journal, un livre ou mener des activités de loisir : cette situation met en difficulté toute personne montrant un problème d’accès à l’écrit, comme les personnes atteintes d’une aphasie. En effet, des chercheurs ont montré que les troubles du langage et de la lecture survenant à la suite d’un AVC affectent la qualité de vie des personnes (Dalemans et al., 2010; Purdy et al., 2019; Villain, 2018) au point qu’elles peuvent souffrir d’isolement social (Lee et al., 2015).
La remédiation d’un trouble de la lecture s’avère donc être d’un intérêt réel pour redonner leur libre choix et leur autonomie sociale aux personnes.
Or, à ce jour, la clinique manque de matériel précis et normalisé pour évaluer les troubles acquis de la lecture. Le protocole ETAL comble ce manque.
ETAL est un protocole informatisé d’aide au diagnostic des troubles acquis de la lecture consécutifs à une lésion cérébrale (dysfonctionnement entraînant une difficulté à- ou une impossibilité de- lire de façon fluide et précise et de se relire en écrivant).
Ce protocole donnera à l’orthophoniste des indications pertinentes qui lui permettront de décider d’une remédiation adaptée au problème spécifique du patient.
Cet outil repose sur des connaissances théoriques en sciences cognitives sur la lecture et ses pathologies. Ainsi, chacune d’entre elles résulte d’une hypothèse théorique précise sur les processus cognitifs supposés à l’œuvre dans une tâche de lecture, et permet de cibler un dysfonctionnement spécifique.
Les erreurs sont ensuite étudiées en termes de précision (exactitude de la réponse) et de dynamique du traitement (temps de réaction et durée de production).
ETAL est constitué de 13 épreuves testant la lecture de mots et de pseudomots ainsi que des processus cognitifs spécifiques liés au traitement de l’information écrite (Lecours, 1996). 8 de ces 13 épreuves sont obligatoires ; 5 d’entre elles sont des épreuves complémentaires qui seront passées seulement si l’épreuve dont elles dépendent est chutée. Le protocole ETAL comprend quatre blocs d’épreuves testant soit des routes de lecture (route lexicale ou route sublexicale), soit des processus spécifiques.
Il faut prévoir 30 minutes pour la passation du protocole lorsque le patient ne présente pas de signe de fatigue.
Cette répartition des épreuves en blocs s’appuie sur la modélisation élaborée par André Roch Lecours (1996) ci-dessous en version simplifiée (extraite du manuel ETAL).
Bloc A : 4 épreuves pour tester les processus phonologiques sur différents types d’items linguistiques :
– Lecture de pseudomots, pour identifier le fonctionnement du système de conversion graphème-phonème,
– Dénomination de lettres (si 50% d’erreurs à l’épreuve précédente),
– Lecture de syllabes, pour évaluer le registre graphosyllabique de sortie,
– Lecture de mots, pour repérer des difficultés phonologiques dans le traitement de structures syllabiques complexes.
Bloc B : 3 épreuves évaluant les processus lexicosémantiques :
– Lecture de mots irréguliers et préséants,
– Appariement mot-image, de type [image d’un cœur] avec choix entre chœur/cœur,
– Décision lexicale visuelle, où le patient doit distinguer un vrai mot (irrégulier) d’un mot qui n’existe pas (ex : repas vs kado)
Bloc C : 1 épreuve unique pour évaluer les processus phonologiques supposés actifs dans les registres et dans les lexiques. Dans cette épreuve, il s’agit pour le participant d’associer un pseudomot au mot entendu.
Bloc D : permet d’interroger les effets de fréquence lexicale, de concrétude, de longueur, de classe grammaticale et de morphologie verbale flexionnelle souvent associés à des dysfonctionnements alexiques.
Scoring automatisé
Possibilité de réécoute des productions patients
Spécification des erreurs
Génération des résultats en format .pdf ou .doc
4 modes de présentation :
– Ordre par défaut : affichage des résultats selon l’ordre d’affichage des modules et épreuves dans le programme,
– Ordre de passation : affichage des résultats selon l’ordre de passation des épreuves,
– Ordre croissant : affichage des performances (épreuves) des moins réussies aux plus réussies,
– Ordre décroissant : affichage des performances (épreuves) des plus réussies aux moins réussies.
Sur l’écran principal des résultats sont affichés :
– Les scores bruts automatiquement positionnés dans leur tranche de percentile,
– Les seuils des percentiles (score et temps) afin d’affiner l’analyse des résultats,
– Les commentaires que la thérapeute a pu écrire tout au long du bilan (un champ “commentaires” est disponible à la fin de chaque épreuve ; ceux-ci peuvent être modifiés et enrichis par la suite).
A partir de l’interface principale des résultats, accès aux résultats détaillés, avec :
– L’affichage de toutes les réponses du patient ; avec la possibilité de réécouter les productions orales du patient,
– L’affichage des temps de réaction et des durées de production dont les calculs sont automatisés grâce à la reconnaissance vocale,
– L’accès aux tableaux pour spécifier la nature (substitution, addition, omission, déplacement) et la catégorie des erreurs (lexicalisation, régularisation, stratégie d’approximation, …),
– La possibilité d’ajuster et de corriger les scores post-passation, le temps de latence, début de prononciation, bonne / mauvaise réponse,
– Un champ “commentaires” pour écrire des observations/analyses ou compléter celles déjà écrites au fur et à mesure des épreuves passées. Ces commentaires se retrouveront directement dans l’édition du compte-rendu.
Le protocole ETAL a été normalisé sur 218 participants de langue maternelle française, âgés de 18 à 93 ans. Les critères d’exclusion concernaient les troubles persistants ou invalidants du développement du langage oral et ou écrit, les troubles visuels ou auditifs non corrigés, les antécédents neurologiques, psychiatriques ou des troubles cognitifs ; un déficit au test du PEGV et pour les participants de plus de 65 ans, un déficit à l’épreuve du Mini Mental State Examination.
La population a été répartie ainsi :
– 5 tranches d’âge (18-34 ; 35-49 ; 50-64 ; 65-79 ; 80-95)
– 3 niveaux socio-professionnels (NSP), évalués à partir des informations recueillies sur le parcours scolaire et la carrière professionnelle :
NSP 1 : Pas de diplôme ou très faiblement diplômé (au maximum Certificat d’étude, Brevet de collèges, CAP/BEP et ouvriers qualifiés ou non qualifiés) ;
NSP 2 : Baccalauréat et Bac + 2 (employé, technicien, profession intermédiaire …)
NSP 3 : Bac + 3 et au-delà (ingénieurs, cadres…).
ETAL est issu des travaux de recherche menés par Christiane Soum-Favaro, maîtresse de conférences à l’Université Toulouse – Jean Jaurès et chercheuse au LPLN.
Les co-auteur.e .s du programme sont : Clara Solier**, Emilie Massa*, Catherine Bézy***, Jean-François Camps* & Jean-Luc Nespoulous*
*Laboratoire de NeuroPsychoLinguistique
**Basque Center on Cognition, Brain and Language (BCBL)
***Orthophoniste, retraitée du Service de Neuropsychologie de Purpan, Toulouse
La SATT (Société d’Accélération de Transfert de Technologies) de l’académie de Toulouse a permis le financement du projet ETAL qui a reçu le trophée de la valorisation de la recherche 2020 « Transfert de technologies » (organisé par TTT en partenariat avec l’Université Fédérale Toulouse Midi-Pyrénées et avec le soutien de la Région Occitanie).
Toulouse Tech Transfer (TTT) TTT est l’opérateur régional (Occitanie Ouest) de la valorisation et du transfert de technologie de la recherche publique vers les entreprises. TTT assure la conduite de projets de maturation en investissant sur les résultats les plus prometteurs de la recherche publique afin de commercialiser les innovations auprès des entreprises. L’objectif est de favoriser l’innovation des entreprises, le développement de la compétitivité, ainsi que la création d’emplois et de richesses. TTT est membre du Réseau SATT. Pour en savoir plus : www.toulouse-tech-transfer.com
Laboratoire de NeuroPsychoLinguistique UR 4156 (LPNL – Université de Toulouse – Jean Jaurès). Focalisées sur l’étude des (dys)fonctionnements langagiers et de la cognition, les recherches du laboratoire sont ouvertes aux apports de cadres théoriques variés basés sur une approche interdisciplinaire. L’architecture fonctionnelle du langage y est abordée avec une conception non cloisonnée du langage, dans son interaction constante avec d’autres systèmes cognitifs (mémoire, attention, fonctions exécutives, voix, etc.). Pour en savoir plus : https://lnpl.univ-tlse2.fr/
Dalemans, R. J. P., De Witte, L. P., Beurskens, A. J. H. M., Van Den Heuvel, W. J. A., & Wade, D. T. (2010). An investigation into the social participation of stroke survivors with aphasia. Disability and Rehabilitation, 32(20), 1678‑1685. https://doi.org/10.3109/09638281003649938
Flamand-Roze, C., Falissard, B., Roze, E., Maintigneux, L., Beziz, J., Chacon, A., Join-Lambert, C., Adams, D., & Denier, C. (2011). Validation of a New Language Screening Tool for Patients With Acute Stroke : The Language Screening Test (LAST). Stroke, 42(5), 1224‑1229. https://doi.org/10.1161/STROKEAHA.110.609503
Knollman-Porter, K., Wallace, S. E., Hux, K., Brown, J., & Long, C. (2015). Reading experiences and use of supports by people with chronic aphasia. Aphasiology, 29(12), 1448‑1472. https://doi.org/10.1080/02687038.2015.1041093
Lecoffre, C., Peretti, C., Gabet, A., Grimaud, O., Woimant, F., & Giroud, M. (2017). L’accident vasculaire cérébral en France : Patients hospitalisés pour AVC en 2014 et évolutions 2008-2014. Bull Epidémiol Hebd, 5, 84‑94.
Lecours, A. R. (1996). Langage écrit : Histoire, théorie et maladie. L’Orthoédition.
Lee, H., Lee, Y., Choi, H., & Pyun, S. B. (2015). Community integration and quality of life in aphasia after stroke. Yonsei medical journal, 56(6), 1694-1702.
Lemay, M.-A. (1992). Examen des Dyslexies Acquises (EDA).
Madden, E. B., Conway, T., Henry, M. L., Spencer, K. A., Yorkston, K. M., & Kendall, D. L. (2018). The relationship between non-orthographic language abilities and reading performance in chronic aphasia: An exploration of the primary systems hypothesis. Journal of speech, language, and hearing research, 61(12), 3038-3054.
Mazaux, J. M., Barat, M., Joseph, P. A., Giroire, J. M., Campan, M., & Moly, P. (1997). Troubles du langage, de la parole et de la communication verbale après traumatisme crânien grave. Glossa, 22‑29.
Mesulam, M. M. (2001). Primary progressive aphasia. Annals of neurology, 49(4), 425‑432.
Peretti, C., Grimaud, O., Tuppin, P., Chin, F., & Woimant, F. (2012). Prévalence des accidents vasculaires cérébraux et de leurs séquelles et impact sur les activités de la vie quotidienne : Apports des enquêtes déclaratives Handicap-santé-ménages et Handicap-santé-institution. Prévalence, 10(1), 1‑6.
Purdy, M., Coppens, P., Madden, E. B., Mozeiko, J., Patterson, J., Wallace, S. E., & Freed, D. (2019). Reading comprehension treatment in aphasia : A systematic review. Aphasiology, 33(6), 629‑651. https://doi.org/10.1080/02687038.2018.1482405
Rohde, A., Worrall, L., Godecke, E., O’Halloran, R., Farrell, A., & Massey, M. (2018). Diagnosis of aphasia in stroke populations : A systematic review of language tests. PLOS ONE, 13(3), e0194143. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0194143
Sabadell, V., Tcherniack, V., Michalon, S., Kristensen, N., & Renard, A. (2022). Pathologies neurologiques. Bilans et interventions orthophoniques. de boeck supérieur.
Villain, M. (2018). Dépression post-AVC. Réeducation orthophonique, II(275), 329‑340.
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